Je veux changer le monde

Je veux changer le monde

Chapitre 11 à 23

CHAPITRE 11 : PREMIERE DISPUTE/ MAMAN COMMENCE A COMPRENDRE

 

Tout est vrai, tout est faux

Tout est vrai et faux à la fois

Tout est faux et vrai à la fois :

Tel est le caractère de la Loi.

 

Proverbe de Prajnaparamita-Sutra

 

- Maman, je ne me sens pas bien du tout, je peux rester à la maison ?

- Qu’est-ce-qui a ?

- J’ai mal au ventre, je me sens fatiguée !

- Continue à ne plus rien bouffer et ça passera tu verras ! me dit-elle d’un ton très agressif

- Rien à voir !

- Si tout à voir ! Tu crois que je ne vois rien, cela fait bientôt deux mois et demis que je te vois enlever au fur et à mesure des groupe d’aliments de tes repas.

- De quoi tu parles ?

Je sais parfaitement de quoi elle parle mais je ne veux pas me l’avouer. La première semaine de mon régime j’ai enlevé les sucres, ensuite voyant que je ne maigrissais pas, j’ai retiré les graisses, ne voyant toujours aucun résultat j’ai ôté les féculents, pour finir j’en suis à la période où j’enlève gentiment les protéines (viande, poisson, etc…). Mes repas se résument à de simples légumes actuellement.

 

- Maintenant, ça suffit ton cirque Laeticia, tu voulais maigrir, c’est bon j’ai accepté quelque temps mais là ça va un peu loin. Je te vois presque maigrir à vue d’œil. Tu sais comment on appelle ton problème ? me demande-t-elle en me fixant dans les yeux.

- Non, et je m’enfiche totalement !

- Ben, je vais quand même te le dire : tu fonces tout droit dans l’anorexie !

- La quoi ?

- Oh ! Tu as très bien compris, fais pas l’idiote !

- JE NE FAIS PAS L’IDIOTE, UNE ANOREXIQUE NE BOUFFE RIEN, MOI SI JE MANGE ! Hurlais-je.

- Moi, je n’ai pas hurlé donc pourquoi tu cries ?

- PARCE-QUE TU DIS QUE DES CONNERIES JUSTE POUR ME FAIRE PEUR ET DESOLEE DE TE DECEVOIR MAIS CA NE MARCHE PAS !

- CA M’EST EGAL QUE CA MARCHE OU PAS LAETICIA ! TU VEUX TE LAISSER CREVER DONC VA-S-Y JE T’EN PRIE MAIS PAS CHEZ MOI ! Crie-t-elle ayant perdu toute patience.

- JE CREVE OU JE VEUX D’ABORD !

- TU ES ENCORE SOUS MON TOIT JE TE PREVIENS QUE C’EST ENCORE MOI QUI COMMANDE !

- DE TOUTE FACON QU’EST-CE-QUE CA CHANGE QUE JE MEURS ICI OU AILLEURS ? TU AS TROUVE QUELQU’UN POUR ME REMPLACER, CE CHER BEBE QUI GRANDIT DANS TON BIDE !

 

Elle se lève, tente de me gifler, mais s’arrête avant l’impact et me dit :

- VA DANS TA CHAMBRE, JE VEUX PLUS TE VOIR !

Maman déteste taper car elle a été battue lorsqu’elle était petite et elle ne veut pas ressembler à ceux qui lui ont fait ça.

 

Je lui obéis sans insister, je fuis dans ma chambre et me jette dans le mur. Je m’envoie la tête contre, j’essaie de me l’ouvrir mais impossible j’ai la tête trop dure ou pas assez de force. Je sens que je m’affaiblis comme si j’avais réussis au moins à m’assommer or rien ne m’arrête, je continue de plus belle. Je jette le poing dans la paroi, j’arrive m’égratigner la main, ça ne suffit pas, il faut encore que je me fasse du mal afin que ma douleur physique soit plus forte que ma douleur psychologique, de cette façon, je ne souffrirai plus autant. Car contrairement à la douleur psychologique, le mal physique fait mal quelque temps et après ça disparaît. Je sais que dans ma tête rien n’ira jamais mieux, je serai toujours hantée par ce que je vis et ce que j’ai vécu.

 

Je poursuis mon autodestruction, je sais que les coups dans le mur doivent s’entendre dans tout l’appartement, cela m’est égal.

Au bout d’un moment, maman ouvre ma porte en trombe et me chope par le col et me secoue.

 

- EST-CE-QU’IL FAUT QUE JE T’AIDE ? TU ES COMPLETEMENT FOLLE, FAUT TE FAIRE SOIGNER !

- NOOOOOON, JE N’AI PAS BESOIN DE ME FAIRE SOIGNER, J’AI JUSTE BESOIN DE MOURIR !

- JE TE L’AI DIT SI TU VEUX MOURIR VAS-Y MAIS PAS ICI ! PAS SOUS MON TOIT !

 Je fais tout pour cacher ma main ensanglantée par mon coup de poing. Mes larmes coulent non-stop, le long de mes joues, je tremble, impossible de ma calmer.

- VA-T-EN DE MA CHAMBRE ! Hurlais-je à l’intention de maman

- EH ! TU ME PARLES AUTREMENT, JE SUIS PAS TA COPINE D’ACCORD ! C’EST MOI QUI PAIE LE LOYER ENCORE DONC CE N’EST PAS « TA » CHAMBRE ! CE SERA VRAIMENT « TA »CHAMBRE QUAND TU PAYERAS UN LOYER !

- ALORS JE N’AI PLUS RIEN A……FAIRE…..ICI ! CA….VOUS….ARRANGERAIT…BIEN...QUE JE MEURS…JE…VOUS.

FERAI…PLUS…CHIER ! Criais-je entre sanglots et reniflements.

- OUI TU AS RAISON….MAIS TU ES ICI…ET C’EST COMME CA….

- CA…CA….PEUT…S’ARRANGER !

Elle me lâche et ressors de la chambre. Je pleure, je sanglote, je crie les mêmes mots durant de longues minutes : « POURQUOI….POURQUOI….POURQUOI ? JE VEUX MOURIR…MORT PRENDS-MOI ! PRENDS-MOI ! JE T’EN SUPPLIE ! »

Au bout de deux heures, je me calme, je me couche sur mon lit, deux de mes chats rentrent par ma fenêtre et viennent me faire des câlins, n’ayant pas peur de mouiller leur pelage avec mes larmes il continue de frotter leur petite tête contre ma tête et mes mains. Un des deux se couche à mes pieds et l’autre se love sur mon ventre et il reste là sans bouger jusqu’à que maman fasse son apparition.

 

- Je suis désolée Laeticia, je ne pensais pas tout ce que j’ai dit. Assieds-toi, s’il te plaît !

Je vois qu’elle aussi a pleuré, ses yeux sont rouges et ses joues encore humides.

J’obéis, je m’assieds, elle prend ma tête et la pose sur son épaule et me berce.

- Je sais que ce n’est pas facile ce que tu vis au cycle. Mais il ne te reste plus que quelques mois à tirer et après ce cauchemar sera fini. On fera tout ce qui est dans notre pouvoir pour te sortir de cette école. Et tu sais que quand moi, j’ai décidé de faire quelque chose je le fais.

J’opine de la tête.

- Je sais aussi que c’est dur pour toi d’accepter le bébé, car tu crois que je l’ai fait pour apaiser ma souffrance à propos de la mort de Quentin. C’est faux, c’était un accident. Je n’avais pas l’intention de refaire un bébé car notre vie est déjà assez difficile.

- Mais pourquoi maintenant ? Demandais-je

- Je n’ai pas choisi Laeticia, c’est comme ça, si ce bébé est là c’est qu’il devait être là, tu ne crois pas ?

- Je ne sais pas.

- Et pour ta perte de poids, comprends-moi, je m’inquiète c’est normal. Je sais que l’adolescence c’est difficile, j’étais aussi potelée quand j’étais petite.

- Moi, les gens se moquent de moi tous les jours, je subis leurs critiques tous les jours et j’en ai marre.

- Oui, ma puce, je sais, j’ai une question, tu veux descendre à combien ?

- Je pense que l’idéal serait cinquante kilos.

- Je veux bien accepter mais pas plus bas c’est tout ce que je te demande, ça marche ?

- Oui

- Et j’aimerai que tu manges de tout et pas seulement des légumes. C’est comme une voiture, pour fonctionner il lui faut de l’essence, nous c’est pareil.

- Mais, je ne peux pas. Tout fait grossir sauf les légumes et les fruits.

- Non, on a besoin de tout, le secret c’est de ne pas en abuser c’est tout.

- Oui, peut-être.

- Bon, je vais boire un café et fumer une cigarette, tu viens ?

- J’arrive.

Je mets un gros pull, et je me creuse la tête pour savoir comment je vais cacher ma main.  Elle ne saigne plus, il ne reste que des petites griffures rouges. Pas besoin de la cacher, je peux dire que j’ai joué avec les chats. Peut-être, qu’elle n’y verra que du feu.

 

 

ANOREXIE

 

Anorexie

Tu es arrivée dans ma vie

Lorsque j’étais hantée par l’ennui

Et que je n’arrivais pas satisfaire mes envies

 

Anorexie

Tu es une affreuse maladie

Qui anéantit ma misérable vie

 

Anorexie

Meilleure amie

De la boulimie

 

Anorexie

Tu vas gagner

Malheureuse je le suis

 

Laeticia Roserens 15 ans ½

 

 

CHAPITRE 12 : LES LAXATIFS QUELLE BONNE IDEE

 

La vraie faute est celle

Qu’on ne corrige pas

 

Proverbe de Confucius


Ce soir, nous regardons « zone interdite » sur M6, maman veut absolument que je regarde un reportage sur les anorexiques afin que je réfléchisse à deux fois avant de continuer mon petit régime.

L’émission commence, les premières images diffusées montrent les mannequins d’aujourd’hui, ça ne me choque pas du tout, au contraire, je trouve ces femmes synonyme de perfection incarnée.

 

- Tu trouves ça joli ? Me questionne maman

- Oui, elles sont parfaites ! Répondis-je admirative

- Elles sont moches, on ne voit que les os !

- Ben oui, mais c’est joli ! J’aimerai bien qu’on voie mes côtes à travers ma peau, c’est magnifique.

- C’est n’importe quoi ce que tu dis ! S’agace maman

- Non, ce n’est pas n’importe quoi, c’est les goûts et les couleurs, c’est tout.

- T’as de drôles de goûts.

- Je sais et alors.

 

Le témoignage qui suit est celui d’une jeune fille de vingt-quatre ans, brune, qui raconte sa vie d’anorexique-boulimique. Elle fait trente-deux kilos pour 1m76.

Elle est maigre, elle est belle, elle est parfaite à mes yeux. Un moment son médecin généraliste lui demande :

 

« Prenez-vous des médicaments afin d’accélérer votre perte de poids ? »

« Oui, tous les soirs, je prends trois laxatifs pour éliminer tout ce que j’ai pu ingurgiter dans la journée et même si je n’ai rien avalé, ça me permet d’éliminer ma cellulite et la graisse que j’ai en trop sur les hanches et mon postérieur ou sur mon ventre »

 

Les laxatifs, tient, je n’y avais pas songé. Demain, nous allons en ville avec maman et elle va me donner mon argent de poche donc de ce fait j’irai m’acheter des laxatifs en espérant que ça me fera perdre du poids plus rapidement.

 

Son médecin continue de l’interroger :

 

« Et vous avez l’impression que cette prise de laxatifs vous fait perdre du poids ? »

« Moi, lorsque je me regarde dans la glace, je n’en ai pas l’impression pourtant la balance, elle, me dit le contraire. Elle me dit que je perds deux voire trois kilos par semaine »

 

Elle continue de relater son histoire, je sens le sommeil m’envahir et mes paupières tomber.

- Alors qu’est-ce-que tu en penses ? me réveille maman à la fin de l’émission.

- J’en pense que je suis fatiguée et que je trouve ces filles magnifiques et si belles !

- Pfff…. Soupire maman d’un ai dépitée.

- Bon, bonne nuit, je vais me coucher. Elle ne répond rien.

 

En arrivant dans ma chambre, je me tourne vers le miroir : rien à changer, je suis toujours un gros boudin hideux. Je suis désespérée, une larme salée se terre au coin de ma bouche.

Que dois-je faire pour maigrir ? Je n’y arrive pas ! Pourtant j’ai tout essayé, RIEN !

 

Je me couche un pincement au cœur, j’ai mal au ventre. J’ai l’impression qu’on me serre les entrailles pour en faire de la bouillie. J’ai froid, je ne ressens plus aucune chaleur. Je me tourne et me retourne des cinquantaines de fois. Je tente de trouver une position confortable qui stoppera net cette douleur abdominale et ce froid glacial.

Rien n’y fait. Je réfléchis aux solutions qui me permettront de perdre un maximum de poids en un minimum de temps. Je me demande ce que maman a prévu comme repas demain et quelles excuses vais-je encore pouvoir inventer pour ne manger ni viande, ni féculent, ni graisse, rien que des légumes et des fruits. Comment vais-je pouvoir lui fausser compagnie quand nous serons au magasin pour aller m’acheter des laxatifs ?

 

Tout se mélange dans mon cerveau : les questions, les réflexions, les recherches pour savoir comment maigrir au plus vite.

Je ne fais que penser, cogiter, tourner dans mon lit. Je ne puis dormir, les heures passent, ma tête se surchauffe.

Tout n’est que désespoir, je n’arriverai jamais à maigrir un minimum. Cela fait un peu plus de trois mois que je suis au régime. J’ai éliminé tous les aliments qui auraient tendance à me faire grossir : sucres, graisses, viandes, féculents, produits laitiers, TOUT !

Je suis l’horreur de la nature et je le serai pour toujours et à jamais !

 

 

TIRE DE MON JOURNAL INTIME

 

Mercredi, le 18 mars 2003

Pourquoi, je vous fais chier ?

Je n’ai jamais rien fait de mal, mais en venant en ce foutu monde, je vous ai tué d’ennuis !

Je me suiciderai et je vous emmerde !

VOUS TOUS : Maman, Ophélie, papa, vous mes camarades d’école !

TOUS SANS EXCEPTION !

TOI, bébé qui va venir au monde pareillement !

ALLEZ TOUS VOUS FAIRE FOUTRE !!!

 

Laeticia Roserens 13 ans

 

CHAPITRE 13 : RENCONTRE AVEC LA MEDIATRICE SCOLAIRE

 

Si le papillon s’est brûlé à la lumière

La lumière a connu les ailes

Du papillon et les a aimées.

 

Proverbe de l’Evangile de la Colombe

 

Mercredi matin, je n’ai pas fermé l’œil de la nuit. Chaque fois que je tentais de les fermer, d’horribles cauchemars m’envahissaient. Je me sens très faible, je me lève et me rassois immédiatement car des étoiles se mettent à faire une farandole devant mes yeux.

Je trouve tout de même la force de me relever. Durant un instant, je dois me tenir au mur afin de ne pas m’écrouler au sol. Je ne m’inquiète pas, ça doit être le fait que je me suis levée trop vite et aussi car je suis censée avoir mes règles qui débarquent  aujourd’hui. Rien de grave.

 

La routine de la matinée se déroule comme chaque jour :

 

- Gros tas de morve !

- Résident Evil !

- Va te cacher, t’es trop moche, tu pues !

 

Je ne me défends pas, à quoi cela servirait-il à part à m’attirer encore plus de problème. Maman m’a toujours dit de laisser faire les choses et que si je ne faisais pas attention, ils finiront par se lasser. Malheureusement, ça ne fonctionne pas ainsi de nos jours. Et de toute évidence, je suis une grosse trouillarde pour me défendre, pourtant j’aurai tant de choses à leur dire :

 

«  C’est vous qui êtes moche de réagir ainsi avec moi ! Allez mettre une annonce à la migros pour vous trouver un autre souffre-douleur, j’en ai marre de jouer ce rôle que je n’ai pas choisi ! bande de bouffons, c’est à vous d’aller vous cacher ! »

Je n’ai pas grande gueule, j’ai trop peur d’eux.

 

Heureusement, ce matin, j’ai rendez-vous chez la médiatrice du cycle. Madame *Solen *, elle pourra m’aider j’espère à arranger les choses avec mes camarades. J’ai l’entretien pendant que les autres ont cours de biologie avec Madame *Pascal * alias « l’escargot », elle parle beaucoup avec lenteur.

 

Je frappe à la porte du bureau, une femme rondelette, petite, cheveux noirs avec des reflets rouges coupés court, le nez décoré par de petites lunettes rectangulaire m’ouvre.

 

- Bonjour, tu dois être Laeticia Roserens.

- Oui.

- Entre, je t’en prie !

J’entre dans la salle, à ma droite une table carrée entourée de quatre chaises, à ma gauche une étagère bleue où sont rangés toutes sortes de classeurs et au fond de la pièce deux fenêtres donnant sur la cour d’école et un ordinateur.

 

- Assied-toi je t’en prie !

- Merci

- Alors que puis-je faire pour toi ? Sur le petit mot que tu as mis dans ma boîte aux lettres, tu dis être le souffre-douleur de la plupart des élèves de ce cycle. Tu dis avoir souvent envie de mettre fin à tes jours, que tu en as marre de la vie ! En résumé, des choses assez graves enfaite.

- Oui, je sais.

- Pourquoi, explique-moi, ce grand mal être !

- Je suis grosse, je suis moche, les autres ne cessent de me le rappeler

- Pourquoi, dis-tu être moche et grosse ?

- Car c’est ce que je vois chaque matin, chaque midi et chaque soir en me mirant.

- D’accord, tu sais il est normal qu’une adolescente comme toi soit mal dans sa peau, cela fait partie de cette période des plus difficiles.

- Oui, j’en suis consciente, mais je pense que si les autres seraient plus sympas avec moi, je serai moins mal. J’ai l’impression de ne pas avoir ma place parmi des jeunes de mon âge.

- Et pourquoi ?

- Je me sens si différente d’eux, je n’ai pas les mêmes sujets de conversation, les mêmes passions ?

- Et quelles sont ces sujets de conversations et ses passions qui te rendent si différente des autres.

- Mes passions sont l’écriture et les animaux. Vous connaissez beaucoup d’ado avoir ces passions.

- Je t’avoue que je n’en ai pas beaucoup vus et pourtant j’en ai vu quelques-uns mais eux n’avaient pas de problèmes à s’intégrer.

- Tant mieux pour eux, malheureusement pour moi ce n’est pas si facile.

 

Je sais qu’elle ment, impossible qu’il y ait des ados de mon âge qui aient les mêmes passions que moi. Des adultes oui possible, mais les ados non. Eux tout ce qui les intéresse, ce sont les people, la musique, les garçons, les filles, le faire pour la première fois, l’alcool, la drogue et j’en passe. Des trucs inutiles pour construire une vie à proprement parlé.

 

- Oui, je comprends, parle-moi un peu de ta famille.

- A la maison, ce n’est pas la joie non plus. Ma maman m’a annoncé qu’elle était enceinte d’un autre père que le mien et je ne peux pas l’accepter et elle me crie dessus chaque jour car je veux perdre du poids.

- D’accord, pourquoi, ne peux-tu pas accepter ce bébé, c’est mignon un bébé non ? Tu devrai être contente d’avoir un frère ou une sœur ?

- Non, j’ai déjà une sœur ça me suffit et un frère qui ai décédé quand j’avais quatre ans, c’est pour ça que je ne peux pas accepter celui qui va arriver. Il va prendre la place de mon petit frère mort dans le cœur de ma maman.

- Non, Laeticia, jamais aucun être ne remplacera ton défunt frère dans le cœur de ta maman. Elle y pensera toujours et elle le gardera à jamais gravé dans sa mémoire et ça tu le sais.

- Peut-être.

- As-tu fait le deuil de cette mort ?

Je ne m’étais jamais posé la question. Est-ce-que j’ai fait le deuil de mon petit frère ?

- Je ne sais pas.

- Sinon, tu as autre chose sur ta famille ?

- Oui, mon père, je suis en conflit perpétuel avec lui depuis toujours.

- Pour quelle raison ?

- Il m’a toujours sous-estimé, il ne s’est jamais occupé de ma sœur et moi. Il veut contrôler ma vie quand il n’en a jamais fait partie par son absence, il ne me connait pas et je pense qu’il ne me connaîtra jamais.

- Ah ! Oui je comprends, et tu as déjà essayé de lui parler ?

- Oui, plus d’une fois. J’ai essayé par écrit, j’ai essayé face à face, il changeait quelque temps et après il redevenait ce qu’il était.

- Ecoute Laeticia, ça va sonner dans cinq minutes, je pense que le meilleur moyen est de voir quelqu’un de plus spécialisé que moi.

- Vous voulez dire un psychologue ?

- Oui, c’est rien de méchant, c’est pour t’aider.

- Oui, je sais j’ai déjà été chez un psychologue.

 

Des souvenirs se projetèrent dans mon esprit.

 

Je suis dans ma chambre, j’étais âgée de quatre ans et demis ou cinq ans. Je jouais au playmobiles. J’avais une sacrée collections de ces petites figurines. Je vivais à Arveyes à l’époque

 

- Il est bleu, il est bleu, il faut l’amener à l’hôpital ! Criais-je en mettant un playmobile sur une petite civière en plastique. Chaque fois que j’y jouais, c’était la même histoire. Un personnage était dans son lit, et ses proches le découvraient bleu et l’emmenaient à l’hôpital.

Maman m’épiait depuis l’entrebâillement de la porte, une grande inquiétude dans le cœur.

Elle a décidé de prendre contact avec un pédago psychiatre ayant son cabinet à Aigles.

 

Une semaine après, j’étais à la salle d’attente d’un grand bâtiment violet ressemblant à une école. Je jouais au cheval à bascule mon doudou représentant un gros chat gris, orné d’un grand papillon vert au cou que j’avais baptisé Juju était dans les bras.

 

Maman lisait un magazine sur une chaise en plastique quand soudain une voix douce et apaisante nous appela :

 

- Madame Roserens ?

Un homme brun, avec une petite moustache brune elle aussi se tenait devant nous. Maman se leva, serra la main du monsieur en question.

- Bonjour, je suis le docteur Richard, je vous laisse me suivre s’il vous plaît.

- Laeticia, viens on y va.

Je saute de mon cheval et les suit le long d’un grand et long couloir violet. Nous rentrons dans une salle magnifique :

A notre gauche se trouvait une grande armoire bleue, une petite table et quatre chaises, à droite de grosses formes en mousse de toutes les couleurs, au fond deux grandes fenêtres donnaient vue sur un petit terrain herbeux et à la droite de ces fenêtres un espèce de tableau blanc avec des stylos indélébiles.

 

- Asseyez-vous Madame, Laeticia, tu peux aller dessiner sur le tableau pendant que je discute avec maman d’accord.

J’ai répondu oui et me suis dirigée vers le tableau en question.

 

Monsieur Richard et maman ont discuté une vingtaine de minutes ensemble. Maman vint vers moi et me dit :

 

- Je te laisse avec le Monsieur, il veut discuter avec toi. Je ne serai pas loin, je serai à la salle d’attente d’accord.

- Oui.

Elle sortit.

- Laeticia, tu veux jouer avec les formes en mousse ?

- Oui.

- Je te laisse faire une maison ou quelque chose comme ça avec les formes et après je t’explique la suite d’accord.

- Oui.

J’ai construis un fort ou je me sentais en sécurité avec mon Juju, Richard s’amusa à jouer le rôle du méchant loup qui voulait manger mon doudou.

 

J’ai été patiente chez lui durant quatre ans, on a joué, on a parlé, par moment j’ai même pleuré. Il était le psychologue idéal, je l’appréciais énormément. Quel a été mon amertume quand je n’ai plus pu être suivie par lui car nous déménagions sur la Valais. C’était vraiment quelqu’un d’exceptionnel.

 

- Laeticia, tu es d’accord que j’appelle ta maman pour parler de tout ça et pour prendre une décision ?

Madame Solen me retira de mes songes.

- Oui, oui ça marche. Répondis-je

- D’accord, tu peux m’écrire sur cette feuille le numéro de ta maman.

Elle me tend un stylo et je note le numéro.

- Merci, bon ça va sonner. Courage et à bientôt

- Oui, merci

 

La matinée touche à sa fin.

- Laeti, tu étais où pendant la biologie ? m’interroge Sylvie lorsque nous nous installons dans le car.

- J’étais chez la médiatrice

- Ah !ok, elle t’a dit quoi ?

- Qu’elle allait appeler ma maman pour organiser un rendez-vous chez une saleté de psychiatre. Je n’ai pas besoin de ça, je ne suis pas malade mentale que je sache. M’énervais-je.

- Si elle fait ça, c’est pour t’aider, rien de plus ! Raisonne Sylvie.

- Non, je n’ai pas besoin d’aide ! M’exclamais-je avec rage.

 

Quelque chose atteint mon cuir chevelu, je passe la main dans mes longs cheveux blonds, un truc est collé dans mes cheveux, ce n’est autre qu’un chew-gum. Je me retourne, sans grande surprise Christine me toise en ricanant bêtement. Je pose mon regard sur Sylvie :

- Excuse-moi de te dire ça, mais ta sœur est une espèce de grosse connasse !

- Je sais, elle fait toujours la conne avec moi aussi.

 

J’arrive chez moi, Ophélie est déjà rentrée, elle discute avec maman de son petit amoureux Damien.

- Tu sais quoi maman ? Avec Damien on se mariera à vingt ans.

- Ah ! Bon. Répond maman enjouée

Entendre cela d’une petite bouche de huit ans me fait sourire.

 

Le pire moment de la journée prend place : « le repas » : pâtes et mousse au thon, tout pour faire grossir : les féculents, le poisson baigné dans de l’huile cru et le pire de tout « la mayonnaise ».

Cela fait un total de 100gr de pâtes : 360 calories

                    100gr de mayonnaise : 720 calories

                    100 gr de thon : 118 calories plus l’huile je n’imagine même pas.

« Non, ça fait beaucoup trop, il faut que j’invente une excuse valable »

 

- Maman, j’ai mangé des chips à la récréation donc je n’ai pas très faim.

- Je m’en fous, tu manges c’est tout ! M’ordonne-t-elle

L’angoisse me noue les tripes. Je regarde la nourriture proposée devant mon nez. Je conçois ces aliments en forme de couteaux d’une lame de trente centimètres me transperçant violemment le cœur et m’assassinant d’une extrême violence. Ces couteaux sont mes pires ennemis, je ne dois surtout pas les laisser m’atteindre, JAMAIS !!!

 

- Non, je n’ai pas faim.

- Tu manges, c’est moi qui décide.

- NON, NON… hurlais-je à plein poumon.

Et on recommence les menaces :

- SI TU VEUX CREVER, TU VAS TE FAIRE CREVER AILLEURS MAIS PAS CHEZ MOI T’AS COMPRIS ?

- QUELLE IMPORTANCE QUE JE CREVE ICI OU AILLEURS ? TON SALE BEBE ME REMPLACERA D’UNE FACON OU D’UNE AUTRE !

 

Je hurle, je crie, je m’égosille, je pleure, je ne me rends plus compte de ce que j’émets comme affreuse parole, mon démon intérieur a pris possession de mon corps tout entier ainsi que de mon cœur. Ma voix me paraît si lointaine comme si je parlais dans un rêve.

J’accours dans mon refuge, mon abri, ma chambre en un mot. Je m’écroule à terre :

 

- J’AI MAL ! JE SOUFFRE ! ENLEVEZ-MOI LA VIE PITIE ! ARRETEZ DE ME FAIRE SOUFFRIR. POURQUOI, POURQUOI, ENLEVEZ-MOI CETTE SOUFFRANCE, ACHEVEZ-MOI PAR PITIE !

 

Je sanglote, je ne prends même pas la peine d’essayer de respirer, mes larmes coulent, coulent sans s’arrêter, je n’arrive pas faire cesser cette inondation, je n’arrive pas me calmer, impossible de redevenir lucide. Je me fais des films d’horreur dans la tête, je vois mon corps démembré sur les rails d’un train, mes veines tranchées sur mon lit, un sommeil profond après la prise de nombreux somnifères, une corde à la branche d’un arbre etc… Je souhaite qu’une seule chose que mon corps soit inerte au milieu d’une flaque de mon propre sang, se serait tant jouissif pour les autres ainsi que pour moi. Rien que d’y penser ça me fait rêver.

 

Après cette crise des plus graves et des plus longues que j’ai eu, je m’endors épuisée par tant de larmes sorties de mon corps.

 

Il est 16h00, quand maman entre dans ma demeure. Elle est calmée mais tout de même sur la défensive, elle me dit d’un ton sec :

- Tu viens en ville ou pas ?

Ma première idée de réponse fut « non », mais soudain je me rappelle que j’ai quelque chose d’important à faire à Sion : m’acheter des laxatifs pour accélérer ma perte de poids.

- Oui, je viens.

- Ok, le taxi arrive dans dix minutes.

- Oui.

Je me lève, me regarde dans le miroir et dit à voix haute :

- Bientôt mon cher ventre tu disparaîtras grâce aux laxatifs.

Mes yeux sont encore rougis et bouffis, ils sont plus bleus que jamais. C’est la seule chose qui me plaît chez moi et que je n’échangerai pour rien au monde : mes yeux.

Dix minutes passent, je me vêtis de noir j’adore le noir c’est ma couleur préférée.

 

 

MES VALEURS

 

Ma famille

Sont mes amis

Qui jamais n’oublient

Le cadet de mes soucis

 

Mes amis

Sont ma famille

Qui jamais n’oublient

La passion et l’envie

 

Mes valeurs

Sont mes couleurs

Sont ma torpeur

Qui oublient mes peurs

 

Mes peurs

Sont mes pleurs

Sont mes fleurs

Qui jamais n’oublie ma rancœur

 

Ma famille mes amis

Sont mes valeurs

Sont mes rires et mes pleurs

Que jamais n’oubliera mon cœur

 

Laeticia Roserens 15 ans ½

 

 

CHAPITRE 14 : JE ME LANCE DANS LE GOTHISME

 

Tout dit dans l’infini quelque chose à

Quelqu’un. Une pensée immense emplie

De tumulte superbe. Vents, ondes,

Flammes, arbres, roseaux, rochers, tout vit !

Tout est plein d’âme

 

Proverbe de Victor Hugo

 

 

Le taxi nous dépose devant la Migros de Sion. Maman, me donne mes cinquante francs et nous nous séparons : elle de son côté faire les commissions et moi du mien pour me diriger vers la pharmacie.

 

- Bonjour que puis-je faire pour toi ?

- Voilà, j’ai de gros problèmes de constipations et je souhaite trouver un remède pour régler ce problème des laxatifs est le meilleur je pense.

- As-tu une ordonnance ?

- Euh…Non

« Merde, là je suis grillée, ils ne vont pas m’en procurer »

- Ecoute, les seuls laxatifs que nous vendons sans ordonnance sont ceux faisant partis de l’homéopathie : dont les zeller ou les valverde.

« Ouf… »

- Ca me va très bien, je préfère me soigner à l’homéopathie qu’avec des produits chimiques. Je prendrai les Zeller s’il vous plaît.

- Voilà, 9.80 francs s’il te plaît. A consommer avec modération. Me conseille-t-elle

- Oui, pas de soucis.

- Merci, bonne fin de journée

- Merci à vous aussi.

 

Je les terre dans mon sac à main, espérant que maman ne mettra pas la main dessus. Je monte au rayon multimédia voir les CDs. J’ai déjà ma petite idée sur celui que je vais acheter : « Alizée ». J’accomplis mon achat et me dirige vers le rayon cosmétique afin de m’acheter de la teinture pour changer un peu de tête, peut-être cela me fera-t-il me sentir mieux dans ma peau. J’opte pour la couleur rouge grenat. J’ai enfin fini mes courses, je vais rejoindre maman et Ophélie dans les rayons alimentation.

Après quelques minutes de tourne en rond dans le magasin, je les trouve enfin vers les légumes.

 

- Laeticia, qu’est-ce-que tu as acheté ? Me questionne maman curieuse.

- J’ai acheté le CD d’Alizée et de la teinture rouge pour mes cheveux.

- Tu sais que je ne suis pas trop d’accord pour la teinture, ça fout les cheveux en l’air.

- Je sais mais c’est juste une fois pour voir. Tu pourras me la faire ce soir ?

- Oui, va choisir tes yaourts !

- J’y vais.

 

Je vais à la zone produits laitiers. Les yaourts normaux, sans façon, bien trop sucrés et bien trop caloriques. Je jette un coup d’œil sur le tableau des contenus :

Crème au chocolat normale : 100 gr = 132 kcal c’est énorme.

Je fais le tour de tous les yaourts light, il m’aura bien fallu vingt minutes pour enfin faire mon choix.

Je choisir les flans light : 100gr = 64 kcal

Je regarde celles qui composent le lait entier : 100 ml = 67 kcal, c’est beaucoup trop donc je prends le 0,1% de matière grasse contenant 100ml = 33 kcal.

Les calories qui composent toutes la marchandise de ce magasin commencent à me hanter, je n’ai qu’une envie, regarder le tableau du contenu sur chaque produit. Je veux savoir ce que je peux manger et ce que je ne devrai plus jamais ingurgiter.

 

Chocolat : 100gr = 550 kcal

Pâtes    : 100gr = 360 kcal

Bonbon :  100gr = 380 kcal

Chips    : 100gr = 580 kcal

Huile     : 100ml = 900 kcal

 

Les seules choses que je peux encore avaler sans trop de soucis sont : la salade, certains produits light ainsi que des biscottes car le pain a quand même 285 kcal dans 100gr c’est gigantesque. Je prends du fromage ¼ de gras, des biscottes, de la mozzarelle ¼ de gras aussi, etc… et vais rejoindre maman qui doit déjà être aux caisses à m’attendre.

 

- Laeticia, tu faisais quoi ? Tu as fait long ! S’exclame-t-elle en me voyant arriver aux caisses.

- Rien de très important. Je peux prendre tout ça ? Lui demandais-je en lui montrant tous mes choix.

- Je ne suis pas trop pour mais au moins ça te fera manger autre chose que de la salade car rappelle-toi ce que tu m’as promis l’autre fois : que tu descendais à cinquante kilos et qu’après tu arrêterais ce cirque.

- Oui, maman je sais.

- Eh tu sauras qu’une fois que j’estime que tu es à cinquante kilos, je ne t’achèterai plus ces cochonneries. Tu m’as bien comprise ?

- Oui, maman.

- D’accord.

 

Nous sortons de la Migros et nous dirigeons sur la place du Midi. Nous nous arrêtons à « Mixer » un magasin de vêtements. Un habit à l’entrée me tape dans l’œil, un très long manteau en similis cuir  noir, je tombe sous son charme.

- Maman, regarde ce manteau, il est trop beau !

- Oui, il est joli.

- Il est nonante-neuf francs, ce n’est pas cher pour du cuir.

- C’est du faux cuir, du simili ! M’informe-t-elle

- Oui, mais même.

- Il te plaît vraiment ?

- Oui énormément.

- Bon je te le prends mais après je ne t’achète plus rien jusqu’à la fin du mois. Cède-t-elle

- Génial, merci maman.

 

Je l’enfile pour voir comment il me va, il touche presque le sol, il m’arrive un peu plus bas que les chevilles. Je me regarde dans le miroir de la boutique, je l’adore, il m’amincit. « Je le prends » Dès que maman a payé nous sortons, je le mets directement, je me sens si bien avec.

 

Nous rentrons à la maison, maman me fait la teinture. Je trouve que ça me va bien. Je prépare le repas : salade tomates mozzarella (1/4), je ne mets ni huile, ni mayonnaise, rien que du vinaigre, du sel et des épices.

 

- Laeticia, ta salade est dégueulasse et cette mozzarelle n’a aucun goût ! Il n’y a ni huile, ni mayonnaise. Si toi tu veux te mettre au régime c’est ton problème mais ta sœur et moi n’avons pas à supporter ça ! S’exclame maman

- Quoi ? Je fais attention à votre santé, l’huile et la mayonnaise c’est pas bon.

- Si on en a besoin mais comme toute chose, il ne faut pas en abuser !

- C’est faux, le sucre on en n’a pas besoin. Sur la pyramide alimentaire ils sont tout au sommet au même niveau que les graisses.

- Oh ! Tu m’énerves. Dit maman d’un ton désespéré.

- TOI AUSSI TU M’ENERVES, TU NE VEUX PAS ME COMPRENDRE ! Hurlais-je

- MAIS BIEN SUR C’EST TOUJOURS DE MA FAUTE DE TOUTE FACON ! SI TU ES SI MAL ICI QU’EST-CE-QUE T’ATTENDS POUR PARTIR ?

- SI J’AVAIS DES SOUS, JE PARTIRAI BIEN VOLONTIE, SANS CA JE NE PEUX PAS ME PAYER UN APPARTEMENT !

- VA DANS TA CHAMBRE AVANT QUE JE T’EN FOUTE UNE ! Me menace-t-elle

Elle se lève, débarrasse les assiettes et commence à les mettre dans le lave-vaisselle. Bien sûr je n’ai rien mangé, juste deux bouts de mozzarella.

- T’ES ENCORE LA !

- FOUS-MOI LA PAIX !

Cette fois ce fut, la goutte d’eau qui fait déborder le vase, elle me gifle. Je n’ai pas vu arrivé l’impact de sa main contre mon visage. Je me retrouve à plat-ventre au sol, j’ai failli me heurter la tête à la porte du lave-vaisselle ouverte. Je file dans ma chambre comme à ma grande habitude.

Et je recommence ma folie comme l’autre fois : tête envoyée contre le mur, cris déchirant, poing dans la paroi :

 

- POURQUOI ? AIE J’AI MAL ! ARRETEZ DE ME TORTURER ! JE NE VEUX PLUS SOUFFRIR ! LAISSEZ-MOI CREVER ! MORT PREND-MOI JE T’EN SUPPLIE !

Ma vision devient floue, je m’affaiblis, pourtant je ne cesse de hurler à la mort. Est-ce vraiment moi qui crie ? Je l’ignore. Ou est-ce à nouveau mon démon intérieur ? Celui qui me tue à petit feu. Ce démon est synonyme de ma haine, ma tristesse, ma souffrance, mon mal de vivre etc… je m’égosille.

Soudain la porte s’ouvre dans un fracas assourdissant et maman me sort la même réplique que la fois dernière :

- FAUT VRAIMENT DE FAIRE SOIGNER MA POVE FILLE, TU DEVIENS COMPLETEMENT FOLLE MA PAROLE !

- NON, JE N’AI PAS BESOIN DE ME SOIGNER NI D’AIDE !

-OH ! SI TU AS BESOIN D’AIDE CAR LA CA DEVIENT GRAVE !

 

Je ne réponds pas, je ne sais plus quoi répondre, je ne suis apte qu’à pleurer et à sangloter. Elle part en me livrant à ma précieuse solitude.

Deux heures passent, il doit être aux alentours de 22h00, la maison est calme, je n’entends que les brouhahas de la télévision, maman a du s’endormir devant. Je pénètre hors de ma chambre faisant preuve d’une extrême discrétion pour aller me procurer un verre et une grande cruche d’eau.

Je retourne dans ma chambre, m’assois sur mon lit et déballe mes laxatifs, étudie la notice : Prendre un ou deux laxatifs.

Effets secondaires : risques de grosses diarrhées.

Je ne compte pas en prendre qu’un ou deux, ça ne fonctionnerait pas comme moi je veux, donc allons-y pour cinq. Ils recommandent aussi d’ingurgiter une bonne dose de liquide. Je me sers 2dl d’autre entre chaque pastille. Je déteste la flotte.

J’ai terminé, toute cette eau m’a gonflé l’estomac et il fait de drôles de gargouillements, cela doit être normal à mon humble avis. Je me couche et m’endors d’un sommeil très léger.

 

Au milieu de la nuit, une douleur abdominale des plus insupportables m’agresse. Je me plie en deux, je susurre des « aie, aie ». J’ai grand besoin d’aller à selles. Je souhaite courir, impossible la souffrance stomacale me cloue au lit. « Je dois y aller, je n’ai pas le choix » il faut que je prenne mon courage pour me mettre sur mes jambes tremblantes. Je fais preuve de courage et marche en boitant en direction de la salle de bain. Les WC me paraissent si loin, elles sont juste au fond du couloir. Je me pose lourdement sur la lunette, à peine ai-je posé mon arrière-train, que les laxatifs eurent parfaitement le résultat que je désirais.

Je passe bien une heure sur le trône à me débarrasser que ces kilos et de cette graisse en trop.

Je me lève, tire la chasse d’eau et sors, or quelque chose ne va pas : J’ai des sueurs froides, j’ai très chaud, je me sens décliner rapidement, je ne sens plus du tout mes membres qui choient sous mon poids, mon champ de vision devient noir. « Est-ce la mort qui me prend ? Suis-je enfin en train d’être libérée de ma souffrance ? Est-ce qu’elle s’éteint enfin à tout jamais ? »

 

Que s’est-il passé ? A mon réveil, je suis étalée de tout mon long dans le corridor. J’ai le sentiment que cela faisait des heures que j’étais inconsciente. Je jette un œil à l’horloge, il est 6h10, ça fait à peine cinq minutes que je suis parterre. Je me remets sur mes pieds, espérant que personne n’a entendu ma chute. Je retourne dans ma chambre, ça ne sert à rien que je me recouche, mon réveil sonne dans vingt minutes.

 

J’ignore ce qui s’est passé et pourquoi ?

 

 

TIRE DE MON JOURNAL INTIME

Mercredi, le 16 mai 2003

Papa, pourquoi ne t’es-tu jamais occupé de moi ?

Ophélie, pourquoi es-tu la chouchoute de tout le monde ?

Désolée Enérgie, je suis peut-être venue au monde pour accomplir une mission, mais je ne l’accomplirai pas.

J’abandonne, je démissionne de la vie, j’en ai marre, je veux mourir, je veux partir de cette existence !

 

Laeticia Roserens 13 ans ½

 

 

CHAPITRE 15 : REACTIONS DES GENS A MON EGARD

 

Je suis, je peux, je suis pouvoir

Je suis, je veux, je suis vouloir

Si « Je suis » alors seulement « je peux »

Si « Je peux », alors seulement « Je mérite »

Et j’ai le droit objectif de « vouloir »

La vie n’est réelle que lorsque « Je suis »

 

Proverbe de Georges Gurdjeff

 

 

Le réveil sonne, je saisis mes habits noirs, les enfile et vais rejoindre maman et Ophélie à la cuisine. Je n’ai pas dans l’intention de lui dire ce qui est arrivé avant.

 

- Laeticia, c’est toi qui es tombée avant ?

« Merde, elle avait entendu, vite trouvons un mensonge valable »

- Euh…Oui, je me suis encoublée sur je ne sais quoi et je suis tombée

- Ah d’accord, tu t’es pas fait trop mal ?

- Non, rien de grave.

« Ouf ! Elle a gobé mon histoire »

 

L’heure arrive de partir dans mon habituel et routinier Enfer : celui de l’école. Je me mire dans la glace avant de partir une dernière fois. Malgré la couleur de cheveux qui a changé et le manteau noir qui m’amincit un minimum, je suis toujours la mocheté du monde : grosse, énorme, sans valeur, sans qualité rien que des défauts. Je ne vaux rien et je ne vaudrai jamais rien. Je ne plairai jamais à personne, je n’aurai jamais de petits copains, je suis condamnée.

En présumant tout ça, une larme caresse avec douceur ma joue pâle.

Je cours à la salle de bain, mettre un lourd maquillage noir sur mes paupières et mes lèvres, c’est la première fois de ma vie que je me grime le visage. Ce maquillage rend mon visage déjà blême à l’origine d’une pâleur encore bien plus maladive. C’est très gothique et j’adore.

Peut-être que si je prends ce style à fond, les autres seront apeurés en me voyant et me laisseront tranquille. En plus le noir est la couleur de la mort et à la mort j’y pense chaque seconde de la journée.

 

Lorsque Sylvie me voit elle est choquée et en même temps admirative.

- Laeticia, ça te va super bien les cheveux rouges et ce manteau est magnifique !

- Merci.

 

Nous parvenons au cycle, les autres ont remarqué mon changement, cela ne leur fit pas pour autant stopper leurs moqueries au contraire ça va de mal en pis. Ils trouvent une autre insulte à me dédier.

 

- Eh regardez y a Dracula qui est sorti de son cercueil ! Il faut le faire retourner au cimetière. Crie Alain.

- Ouai, retourne dans ton cimetière saloperie de vampire !

 

Moi qui pensais que ma métamorphose me séjournerait des toutes ces railleries, me voilà servie.

Je sais que rien n’ira jamais mieux, ni demain, ni dans une semaine, ni dans un mois, ni dans une année, ni dans dix ans ! JAMAIS !

 

 

QU’EST-CE-QUE L’AMOUR

 

Qu’est-ce-que l’Amour

C’est une mer de velours

Qui s’étend sur un long parcourt

Couleur pourpre

 

Qu’est-ce-que l’Amour

Deux fleurs qui s’ouvrent

Deux paires d’yeux qui se croisent tour à tour

 

Qu’est-ce-que l’Amour

Des moments de folies pures

Des instants de souffrances impures

Pour toujours on en est pas surs.

 

Qu’est-ce-que l’Amour

Deux personnes qui se trouvent

Pour ne former qu’un

Qui s’Aiment pour un jour

Ou pour toujours.

 

Laeticia Roserens 16 ans

 

 

CHAPITRE 16 : PREMIERE VRAIE PERTE DE CONNAISSANCE

 

Perdre espoir

C’est un peu comme perdre sa liberté

Son être profond.

 

Proverbe de Rabbi Nachman de Breslau

 

- Laeticia…Laeticia…Allô ! Est-ce-que tu m’entends ?

J’ouvre les yeux : que s’est-il passé ?

Je suis gisante au sol, Monsieur « Solen » le mari de la médiatrice qui est mon prof de gym est penché au-dessus de moi. Je suis au stade où l’ont fait de l’endurance. J’ai très froid, or le thermomètre au-dessus de ma tête affiche 29 °.

 

- Ah ! Elle reprend connaissance. Laeticia, ça va mieux, tu te sens bien ? Sylvie, va me chercher de l’eau s’il te plaît

- Oui, toute de suite.

 

- Laeticia, arrives-tu à t’assoir ?

- Oui, je crois.

 

Je m’aide de mes bras tremblottants.

- Tu as déjeuné ce matin ?

- Oui. Mentis-je

- Ca t’arrive souvent ces pertes de connaissance ?

- Non

- Bon je suppose que ce n’était que le résultat d’une petite chute de tension ou une petite hypoglycémie, rien de très grave qui arrive.

- Monsieur, j’ai l’eau.

- Oui, Sylvie, tu restes auprès d’elle, le temps que je m’occupe des autres.

- Oui, Monsieur, pas de problèmes.

 

Le prof s’éloigne, mon amie me regarde d’un regard plein d’inquiétude.

- Laeticia, je suis inquiète pour toi, ça ne va vraiment pas.

- Ne t’inquiète pas pour moi, tout va bien. Bien sûr moi seule ressent ce sentiment.

- Ok, si tu le dis. Elle ne semble pas du tout convaincue mais elle ne persista pas.

- Dis j’ai une question, toi ça t’arrive de pas avoir tes règles pendant plus de deux mois ?

- Non, elle vienne tous les mois.

- Ah ! D’accord.

 

Cela faisait deux mois que ma menstruation n’a pas fait son apparition, je ne sais pas pourquoi. Je ne m’inquiète pas plus que ça, ne pas avoir ses règles c’est plutôt génial.

- Tu veux pas m’écrire une lettre cette après-midi durant les cours et m’expliquer ce qui ne va pas.

- Tout va bien je te dis et en plus cette après-midi je ne suis pas là. On est le 8 mai 2003 et mon père se marie avec sa nouvelle femme donc cette après-midi j’ai pris congé.

- T’as trop de la chance !

 

La matinée se termine, lorsque j’arrive à la maison, le repas est déjà prêt sur la table. Je sais que chercher des excuses ne sert à rien puisque maman ne veut plus rien entendre, je tente quand même et comme je disais et ne veut rien savoir.

Je n’ai vraiment pas faim, je me sens si légère depuis quelques semaine, je ne ressens plus cette sensation de faim, de ventre creux a totalement disparue. Je ne sens plus rien quel soulagement.

 

Je gobe sans prendre la peine de mâcher deux petites patates frites dans l’huile. Cela m’écœure et me donne envie de vomir. Je ressens de la culpabilité : « Je n’aurai pas du manger ça, c’est gras et horrible pour le poids ».

« Maman, pourquoi me torture-tu à me forcer à manger ces insectes piquants remplis d’un amas de graisse ? C’est un tourment ! »

 

- Laeticia, tu manges plus ! m’ordonne-t-elle

- NON

 

Elle lâche d’un coup sec, son couteau et sa fourchette, ce qui provoqua un bruit aigu et désagréable aux oreilles, lève les yeux au plafond et les redescend sur moi.

 

- A quoi tu joues ? Tu as bientôt fini ton cirque ? m’interroge-t-elle

- Je ne joue pas, je veux perdre les quelques kilos que j’ai en trop c’est tout.

- Même quand tu feras trente kilos, tu me diras la même chose et je veux ne pas en arriver là compris !

- ARRETE, TU ME TRAITE A NOUVEAU D’ANOREXIQUE ! JE NE SUIS PAS ANOREXIQUE POUR L’ENIEME FOIS !

- JE N’AI PAS PRONONCE CE MOT CETTE FOIS !

- OUI MAIS TU L’AS SOUS-ENTENDU.

- NON, PAS DU TOUT !

- SI !

- LA SEULE RAISON POUR LAQUELLE TU A DECIDE DE DEVENIR ANOREXIQUE, C’EST SIMPLEMENT QUE TU AS DECIDE DE TE VENGER CAR J’AI DECIDE DE GARDER LE BEBE !

- NON, JE ME FICHE TOTALEMENT DE TON SALE GAMIN. IL EST RIEN POUR MOI ET IL NE SERA JAMAIS RIEN ! TU ENTENDS ? JAMAIS ! Hurlais-je à perdre haleine, ce fut mes dernières paroles avant de partir au mariage de mon père.

 

TIRE DE MON JOURNAL INTIME

 

Dimanche, le 10 août 2003

 

Voilà, une soirée à la con de nouveau.

J’en ai vraiment marre de cette vie de Merde !

Je veux crever sans avoir eu le temps d’avoir peur. Ophélie, tu me fais chier, même si maman n’est plus avec papa, j’ai toujours une éducation plus sévère que la tienne. POURQUOI ?

Car je suis une conne !

Juste parce-que tu as un tout petit peu de fièvre, tout le monde est à tes petits besoins. On ne t’oblige pas de manger tandis que moi si.

VOUS ME FAITES TOUS CHIER !!!

 

Laeticia Roserens 13 ans ½

 

 

CHAPITRE 17 : MARIAGE DE PAPA

 

Là où sont tes pensées, tu es,

Veillent à ce que tes pensées soient

Bien là où tu veux être

 

Proverbe de Rabbi Nachman Breslau

 

Tonton Gilles, le frère de papa vient nous chercher. Ca faisait bien longtemps que je ne l’avais pas vu. Il a une bonne situation de vie à Paris, il vit là-bas et travaille à l’ambassade américaine. J’avais été lui rendre visite avec ma grand-mère paternelle, il y a de ça quatre ans. Ce fut la première et dernière fois que je vis Paris.

 

Le mariage se déroule à St-Maurice, nous parvenons à destination au cœur de la foule invitée. Parmi ces invités : grand-maman Monique la mère à mon père, grand-papa Guy, tata Mumu. La femme à mon père nommée Renilde qu’on raccourcit en Rê ainsi que les deux filles de celle-ci conçues lors d’un premier mariage, elles se prénomment Clara et Gabriella, et….

« Oh ! Non, il ne manquait plus que lui » Patrick est là avec Alice. Je l’évite le plus possible et ne prend même pas la peine de les saluer.

 

- Laeticia, tu as bien maigri, tu es très bien comme ça, il ne faudrait pas que tu perdes plus de poids. Me fit remarquer grand-maman Monique.

Il faudrait qu’elle change de lunettes, car là elle voit très mal. Où est-ce-que j’ai maigri ? Vous pouvez me dire. Changez vos double foyer, ils ne fonctionnent plus du tout comme il faut. Bien sûr qu’il faut que je perde plus, même bien plus. Je n’ai pas changé, je suis toujours ressemblante à un sumotori.

 

Avant d’aller à la mairie, nous allons partager un apéritif dans une pizzeria du coin. Tout le monde est heureux pour mon père, moi j’avoue que ça ne me fait ni chaud, ni froid qu’il se marie, tant mieux pour lui.

 

Au bout d’une petite heure, nous nous retrouvons dans la mairie. Le maire ou je ne sais quoi commence son long et rasant discours, je m’affale sur ma chaise, je m’ennuie à mourir. Je ne souhaite qu’une seule chose : « Qu’il se taise à jamais » qu’on puisse partir avant que je m’endorme. Les minutes qui défilent me semblent durer une éternité.

 

- Bonne soirée à tous et encore félicitations aux mariés ! S’exclame-t-il gaiement.

 

La prochaine étape, allé grignoter et trinquer chez Ormose, le metteur en scène et ami de papa. On pénètre dans un vieux bâtiment à l’aide d’une grande et haute porte, on monte des escaliers donnant sur une grande cour intérieure. Ce que je vois en premier m’effraie, des tables et des tables sur lesquelles sont étalées plein de calories en forme d’aliment et plein de boissons.

 

La soirée défile, je vais à la rencontre de ma grand-mère :

- Laeticia, que veux-tu faire comme métier ? m’interroge-t-elle

- Toujours vétérinaire

Cela fait depuis l’âge de six ans que je désire faire ce métier.

- Tu as des bonnes notes pour ça ?

- Oui, ça peut aller sauf les math qui me bloquent

« Je hais ce genre de question »

De nombreux invités sont curieux de savoir pourquoi je ne mange pas, je réponds simplement que je n’ai pas faim.

Je n’ai presque rien mangé de la journée et alors ce n’est pas la fin du monde.

 

- Les filles, il est 21h, vous voulez que je vous ramène ? demande mon père à Ophélie et à moi.

- Oui. Répondis-je

« Je n’attendais que ça »

- Mais Stéphane, pourquoi tu ne les ferais pas dormir chez toi ? C’est quand même ton mariage. Le questionne grand-maman.

Mon enthousiasme chute subitement : « Non, pas ça, je veux rentrer chez moi ! » Je ne réagis pas par peur de blesser quelqu’un en refusant cette proposition.

- Je ne pense pas qu’Isabelle soit d’accord qu’elles loupent l’école. L’informe papa

- Laeticia, appelle ta maman et demande-lui ! M’ordonne-t-elle

« Mais je ne veux pas dormir chez mon père, je veux dormir chez moi mais en même temps ceci me ferai rater l’école, ce qui est plutôt plaisant »

J’ai peur de l’appeler, depuis midi nous ne nous sommes pas réconciliées, je tape tout de même son numéro sur mon portable.

- Allô… ?

- Maman, c’est moi.

Je lui explique la situation, elle n’est pas très pour or elle finit par accepter. La petite cérémonie touche à sa fin, il est 23h30. Je n’ai ni souper, ni grignoter.

Nous prenons la route pour aller à la demeure de mon père située à Massongex.

Une fois arrivée, je dis « Bonne nuit » et m’en vais dormir. J’ai horreur de cette appartement, il est tout à côté d’un cimetière et cela me terrifie.

 

Je ne m’endors pas immédiatement, j’écoute les conversations de grand-maman, papa et Rê à travers la porte.

 

- Isabelle est inquiète, elle ne se nourrit que de salade verte sans sauce ou d’une simple moitié de tomate. Explique papa

- Ce n’est pas beaucoup. Et toi Stéphane qu’est-ce-que tu penses de tout ça ?

- Je pense que c’est une petite crise d’adolescente et que ça lui passera.

A ces mots, je suis révoltée. Comment ose-t-il comparé mon affreux mal-être à une crise d’adolescente ? Ca prouve bien qu’il ne me connaît pas, il ne connaît pas sa fille et qu’en plus il ne s’inquiète pas pour moi bon ça à la limite ça m’est égal, ce n’est pas nouveau.

Au bout d’un moment, je n’arrive plus suivre la discussion, le sommeil m’envahit.

 

 

JE SAIS PLUS OÙ J’EN SUIS

 

Je ne sais plus où est ma lumière

Je l’ai trouvée mais reperdue

Je ne sais plus où j’en suis

 

Je ne sais plus où est l’Amour

Qui brillaient dans mes yeux bleus

Il a dû s’envoler avec mon âme

 

Je ne sais plus où est mon cœur

J’entends un lointain battement

Dans ma poitrine

D’où vient-il

 

Je ne saurai jamais dire

« Je t’Aime »

Je ne sais plus où j’en suis

Je crois que je suis en Enfer

 

Laeticia Roserens 16 ans

 

 

CHAPITRE 18 : NAISSANCE DE TIAGO

 

Lorsque tu grandis

Ne pose pas de question. Observe,

Écoute et attends : la réponse

Viendra

 

Proverbe de Larry Bird (Indien Laguna Pueblo )

 

 

Aujourd’hui 13 juin 2003, le riz est au fond de la casserole complétement brûlé. Maman a dû partir très précipitamment. Elle allait vraiment mal, elle ne parvenait plus à respirer, elle a appelé le taxi et s’en est allée. Je prépare un repas plus convenable pour Ophélie, des bâtonnets de poissons et des patates à l’eau. Elle mange sans me poser de question à moi qui ne mange pas, elle commence à connaître le contexte. Nous partons à l’école.

 

Le soir quand nous rentrons, Christelle notre ancienne fille au paire qui est maintenant la conjointe de notre propriétaire qui vit en bas de chez nous vient nous voir. Maman, lui a demandé de s’occuper de nous durant son hospitalisation car elle est sur le point d’accoucher.

Christelle a été mise à la porte car il y a eu une énorme histoire entre elle et maman. Maman n’étant pas rancunière lui a pardonné quelque temps après :

 

Cela s’est passé il y a deux ans. Maman cherchait une fille au paire car à cette époque elle travaillait au Casino de Montreux donc elle partait vers 14h pour revenir vers 6h00, le lendemain matin. Christelle c’était présentée, elle avait dix-sept ans, noiraude, grande, la peau d’une blancheur incroyable. Le courant est tout de suite passé, jusqu’à ce fameux 8 juillet 2001 où tout à chambouler.

 

Christelle fêtait ses dix-huit ans, maman lui avait organisée un souper à la maison avec des amis. Nous étions bien une quinzaine. Après quelque verre, les gens étant un peu grisés dont Christelle. Elle fit une révélation des plus erronées. Elle dit à son meilleur ami au creux de l’oreille comme quoi : Tony le copain à maman lui avait fait des attouchements sexuels. A ces mots maman sachant Tony incapable de faire des choses pareilles s’énerva devant tous les invités outrés par son comportement. Tous étant contre maman, elle balança tout ce qu’il y avait sur la table en cassant la vaisselle, en mettant vraiment tout au sol.

 

J’étais au lit depuis quelques heures, le fracas de la vaisselle se brisant au sol me réveilla en sursaut. Je me lève, entendant maman claquer la porte derrière elle.

Le spectacle que je vis en arrivant à la cuisine me stupéfia sur place, maman s’était assise, fumant une cigarette, elle avait l’air préoccupée.

- Qu’est-ce-qui s’est passé maman ? Lui demandais-je

J’entendais pleurer Christelle dehors et ses amis essayant de la consoler.

Elle m’expliqua et finit par fondre en larmes. J’ai tenté de la raisonner en lui disant que Tony était incapable d’actes pareils. Elle me dit qu’elle le savait parfaitement, c’est pour cela qu’elle s’est enragée de la sorte.

Il était un peu près 0h00, elle appela tata Mumu afin de se confier. Entendant les sanglots de maman, elle sut que ce qui se passait n’était pas bénin.

« Ecoute Isabelle, je viens de voir ! »

- Non, Mumu,  je veux pas que tu te déranges à faire le trajet Trois-Torrent- Sion pour moi.

« Ecoute, j’entends bien que ça va mal, donc dans une petite heure, je suis là. »

- Merci c’est très gentil.

J’attends tata Mumu avec maman. Il était 1h10 quand elle fit son apparition.

- Eh ben, je vois que c’était la fête ! dit-elle en voyant l’état de la cuisine.

- Oui, il faut que je nettoie mais là je n’en ai pas l’énergie. Répond maman.

Dans ma tête je me suis dit « Bonne chance pour nettoyer des tâches de vin rouge sèches » Donc je pris la pâte et lava les plus grosses tâches en évitant de me couper avec les tessons de verre qui traînaient. Tata Mumu est bien restée jusqu’à 4-5heures du matin.

 

Pendant un certain temps maman et Christelle ne se sont plus vues et finalement Christelle avouant que ce qu’elle avait dit était bien des conneries, maman lui pardonna. Elle l’invitait à boire le café presque tous les matins et lui demanda même d’être la marraine de mon petit frère qui allait arriver.

 

- Vous venez les filles pour manger. Nous invita-t-elle.

- On arrive.

Le repas proposé des tranches de viande et des pâtes. Je suis invitée comment refuser de manger avec toute la politesse possible. Je suis dans une impasse là. Comment éviter ?

- Laeticia, ta maman nous a dit de surveiller ce que tu mangeais donc tu ne vas pas pouvoir nous fausser compagnie lors du souper. M’avertit Christelle

« Sans blague »

Je sens un pincement dans mon cœur et mon ventre. Je mange sans grande conviction. Je savais déjà comment me débarrasser de ces déchets que j’ingurgitais en ce moment-même en comptant chaque calories ingurgitées.

Tranche de porc : un peu plus de 133 kcal

Pâtes : toujours 360 kcal.

Je vais monter après à la maison faisant croire à Christelle que je vais chercher un livre et je vais aller tout droit aux toilettes me faire vomir.

J’ai fini, j’ai super mal au ventre d’avoir mangé si lourd, mon estomac n’y est plus habitué.

- Christelle, je peux monter à la maison chercher un bouquin ?

- Oui vas-y ! C’est bien tu as tout mangé, bravo ! Me félicite-t-elle

J’ai l’impression d’être une gosse quand on me traite comme ça.

 

Comme prévu, une fois arrivée à la maison, je file aux toilettes, bois de l’eau chaude pour faciliter le renvoi.

Je me positionne à genoux, la tête au-dessus des toilettes. J’enfonce mon index et mon majeur droits au fond de ma gorge jusqu’à que plus aucun pet d’air ne puisse passer. Cela fut rapide et facile. Tout sortit ainsi qu’un peu de sang, je ne sais pas pourquoi. J’ai dû me blesser la gorge avec mes ongles sans faire exprès. Mes yeux coulent et je transpire, je suis devenue rouge pivoine. Je pars dans ma chambre chercher un livre afin de ne réveiller aucun soupçon.

 

Je redescends au studio de Christelle et de Charlot. A 21h10, mon natel sonne, c’est maman. Elle m’annonce qu’elle a accouché d’un petit garçon, elle l’a appelé Tiago, il est noiraud avec des yeux brun comme ceux de son papa. Elle m’explique le tourment qu’elle a subi toute la journée :

« Ils ont dû me mettre un masque à oxygène, ils ont bien cru que j’allais passer de l’autre côté, pour une fois ils ne m’ont pas fait trop attendre à la salle d’attente ils m’ont prise de suite. Ils ont dû provoquer Tiago car sinon j’aurai pu mourir. Il est né à 20h50 précisément. »

 

A cette nouvelle, je suis contente et en même temps je ne puis m’empêcher d’haïr cet enfant. En plus d’être arrivé sans permission dans le ventre de maman, il a failli me la faire mourir.

Nous irons voir le bébé demain. J’ai hâte de voir sa tête et pourtant je ne puis m’empêcher de continuer d’avoir de la haine à son égard, je suis indécise.

 

 

TIRE DE MON JOURNAL INTIME

 

Mercredi, le 12 août 2003

 

Me voilà à nouveau dans ma chambre :

Triste, déprimée, nerveuse. Deux questions me trottent dans la tête : Qui suis-je ? A quoi je sers ?

Ophélie a déjà un avenir devant elle et moi je ne sais pas quoi foutre de ma misérable vie. Une autre question me torture l’esprit :

« Mes parents sont-ils fiers de moi ? »

Je ne pense pas, qui serait fier d’avoir une fille qui n’a qu’un seul don, celui de faire chier le monde ?

Qui serait fier d’avoir une fille qui n’est ni intelligent, ni belle, ni reconnue, qui est tout simplement conne ?

PERSONNE !!!

 

Laeticia Roserens 13 ans 1/2

 

 

CHAPITRE 19 : VISITE A L’HÔPITAL

 

Le ciel dure, la terre persiste

Qu’est-ce donc qui les fait persister et durer ?

Ils ne vivent point pour eux-mêmes

Voilà ce qui les fait durer et persister.

 

Proverbe de Tao-Te-King

 

 

Aujourd’hui, samedi 14 juin 2003, vers 10h00 du matin je reçois un message de mon père, me demandant comment ça va. Je lui annonce que maman a accouché, il me passe un coup de fil droit derrière :

 

«  Salut miss, tu vas bien ? »

- Ca va et toi ?

« Oui, merci, dis tu crois que ça dérange maman si on passe ce soir la voir Rê, ses deux filles et moi ? »

- Je ne sais pas, il faudrait que je lui demande. Ecoute, je l’appelle et je te redis.

« Ok, à toute à l’heure »

J’appelle maman et lui demande ce que papa m’a demandé. Elle répond qu’il n y a pas de problèmes. Je rappelle papa, il passe nous chercher à Bieudron à 17h00.

 

Il est 17h00, le klaxon retentit en bas de la maison.

- Ophélie, tu viens, on va voir maman.

- Oui, j’arrive.

 

- Salut les filles, vous allez bien ?

- Oui merci papa.

 

Nous arrivons à l’hôpital de Sion, on se renseigne au secrétariat afin de savoir dans quelle chambre se trouve maman.

L’hôpital de Sion est joli et grand. Il est orange, au rez de chaussée, un petit hall représentant comme une salle d’attente avec des chaises et une petite fontaine. Il n’est pas carré comme la plupart des hôpitaux, celui-ci est rond.

 

Nous pénétrons dans l’ascenseur rejoindre le deuxième étage. Nous rentrons dans la chambre là où maman est en train d’allaiter Tiago. Je suis réticente cependant lorsque je vois sa petite bouille et sa petite taille, je ne puis m’empêcher de le regarder tendrement.

 

- Il est trop chou, est-ce-que je peux le porter ? demande Rê lorsque maman eut fini de le nourrir.

- Oui, tiens !

Tout le monde est épris par lui, il a les yeux grands ouverts, il regarde partout d’un regard admiratif et éveillé.

Je demande à mon tour si je peux le porter, je me rappelle comment on soutient un bébé. J’aidais souvent maman quand Ophélie était bébé, je lui faisais le bain, je lui changeais les couches, je jouais avec elle etc….

 

Papa semble lui aussi épris, il sourit et là il demande à maman :

- Tu vas lui donner le nom de famille de Tony ?

- Non, puisque dès que Tony a su que j’étais enceinte de lui, il m’a demandé d’avorter. Je lui ai dit que c’était hors de question, depuis je n’ai plus aucune nouvelle de lui. Alors il portera Roserens puisque j’ai conservé ce nom-là.

- Mais il n’a rien à voir avec la famille Roserens. Dit mon père sur un ton de reproche

- Ecoute, je suis désolée que ça te déplaise mais il est hors de question qu’il porte mon nom de jeune fille Burgat, car ce nom a une trop mauvaise réputation.

- T’aurai pu me demander mon avis.

- Stéphane arrête ! lui demande Rê

Il se tut et la visite touche à sa fin.

- Les filles ont vous attend en bas. Nous avertis mon père

- Oui papa.

 

Ils partirent nous laissant seules avec maman.

- Vous passerez me voir demain avec Christelle et Charlot d’accord ?

- Oui, maman. À demain

 

 

AINSI VA MA VIE

 

Sur le sol je m’écroule

Je sens mon sang qui coule

Je sens mon cœur qui roucoule

Je sens mes larmes qui coulent

 

Ainsi va ma vie

Que mon âme oublie

Sur mon visage une pluie

Sur ma tombe tout se réécrit

 

Sur ma Mort

Mes paroles ont tort

Ma main se tord

Ma vie n’est qu’un ressort

 

Ainsi va ma vie si maudite

Aide-moi Aphrodite

Toutes ces paroles dites

Ne sont que le résumé de mes seize années si maudites

 

Laeticia Roserens 16 ans

 

 

CHAPITRE 20 : SACHEZ MONSIEUR LE DIRECTEUR JE PARS

 

Accepte-toi, toi-même. Accepte tout

Ce que ton être comporte, ses

Richesses et ses pauvretés :

Accepte d’agir tel que tu es :

Accepte ton toi.

 

Proverbe de Père Gustave Desbusquois.

 

 

Lundi, le 16 juin 2003 :

 

Il y a deux semaines avec maman, nous avons visité un institut nommé « Cité Printemps » afin que je puisse aller à l’école sur Sion, dîner à Cité Printemps et rentrer chez moi le soir. Je serai comme on dit en langage courant en externat. Je n’aurai plus jamais de ma vie à franchir le seuil du le cycle de Basse-Nendaz. Nous avons été très intéressées par ce qu’ils proposaient et avons réservé une place pour moi.

 

Les pensionnaires sont entourés d’éducateurs qualifiés et d’écoute perpétuelle auprès des jeunes ayant des problèmes, contrairement à la psychologue que la médiatrice m’a envoyée voir.

 

Le cabinet où travaillait la psychologue chez laquelle j’ai dû aller est apprécié des familles sans grand moyen financier car c’est le seul cabinet aux alentours qui est payé par la caisse maladie, cependant les personnes travaillant là-bas sont complétement nulles.

 

J’ai été suivi par une femme d’une cinquantaine d’année ayant je crois été éduquée par des bourges car ses manières étaient déplaisantes. Du moins, nous avons été que deux fois chez elle, car son pronostic fut le même que celui de mon père :

- Une crise d’adolescente Madame Roserens, pas d’inquiétude, cela lui passera. A-t-elle dit à maman.

- Oui, mais en attendant cette crise comme vous dite dure depuis qu’elle a onze ans. Elle dure depuis deux ans.

- Oui, c’est fréquent, certaines crises sont plus longues que d’autres.

 

Maman, savant très bien que cette femme se trompait, elle décida de m’amener chez une autre psychologue espérant que celle-ci lui avérera qu’en effet je souffre d’une anorexie mentale et physique très grave. Je suis depuis décembre 2002 suivie par une jeune pédago-psychiatre Madame *Fayot *, chez qui je me rends deux fois par semaine.

 

En revenant au présent, nous sommes le 16 juin 2003, je me rends chez le directeur pour lui annoncer que je ne reviendrai pas l’année prochaine et que je ne reviendrai plus jamais.

 

- Bonjour que désirez-vous ? Me questionne-t-il

- Je dois vous parler.

- D’accord, entrez seulement, asseyez-vous ?

 

Je fais preuve de docilité et cherche les mots pour lui dire les choses.

- Voilà, Monsieur, en août je rentre au cycle de Sion, je serai en externat dans un institut, donc je désirerai que vous me désinscriviez d’ici.

- Les choses ne sont pas si simples, vous ne pouvez pas partir comme ça. Il faut demander une permission sous forme de lettre à la commission des écoles. D’après les lois, vous êtes contrainte à fréquenter l’école de la commune dans laquelle vous vivez. M’informe-t-il.

Je sens un désarroi des plus atroces, je soupire et retient mes larmes.

- D’accord.

Je sors du bureau, les larmes inondent mes yeux.

« Ca ne se passera pas ainsi, Monsieur, je peux vous le dire »

 

Maman est toujours à l’hôpital, je rentre à la maison préparer à manger pour Ophélie car Christelle et Charlot ne sont pas là, les deux travaillent.

Je téléphone à maman et lui explique ce que Monsieur Fournier m’a émis comme hérésies.

« Ok c’est comme ça, je vais écrire cette fameuse lettre, elle ne va pas être des plus douces, je peux te l’assurer.

- Ok

«  Justement, j’ai eu mon assistante sociale au téléphone ce matin et elle souhaiterai te voir à la fin des cours cette après-midi pour discuter un peu de ta situation. Elle pourrai nous aider à te sortir de ce cycle. »

- Ok, je passerai la voir.

 

A la fin de l’après-midi, comme prévu je vais chez l’assistante sociale pour lui faire part de ce que je subis chaque jour dans cette infernale école et lui donner de nombreuses raisons du pourquoi je veux partir d’ici le plus vite possible. Je lui relate les insultes qu’on me dédie, les coups que je reçois etc…

- Et toi tu veux quoi, toi personnellement ?

- J’aimerai impérativement changer d’école, malheureusement je n’en ai pas le droit. Le directeur me l’a dit ce matin, il m’a dit qu’on ne pouvait pas changer comme ça d’établissement scolaire sans écrire une lettre trois mois à l’avance à la commission scolaire car nous sommes obligés de fréquenter l’école de la commune dans laquelle nous habitons.

- Oui, en temps normal c’est exacte, mais dans ton cas on peut essayer de faire le nécessaire.

- Dans mon cas ? Demandais-je

- Oui, ta maman m’a dit que tu n’allais vraiment pas bien du tout. Tu rentres toujours à la maison en pleurs, tu t’es fait fissurer le poignet il y a quelque temps par un élève et elle m’a surtout dit que tu ne te nourrissais plus.

- Ah ! je ne sais pas quoi répondre

- Bon je vois bien que tu ne fais pas semblant et je vois que ta situation est très sérieuse. Je te promets qu’on va faire quelque chose. Tu ne remettras plus jamais les pieds dans ce cyle ! Me jura-t-elle

- Merci beaucoup Madame

 

 

TIRE DE MON JOURNAL INTIME

 

Mercredi, le 13 août 2003

 

Ces trois questions me trottent toujours dans la tête :

« Qui suis-je ? A quoi je sers ? Mes parents sont-ils fiers de moi ? »

Si aucun de mes deux parents ne me dit « Je suis fier(ère) de toi » Je manquerai toujours de confiance ne moi et je ne serai jamais bien dans ma peau.

Ces trois questions me transpercent le cœur tel une lame de poignard dans mes plaies ouvertes. J’ignore s’ils sont fiers de moi.

J’ignore ou je suis dans ce labyrinthe : perdue ? Bientôt à la sortie ? Entre les deux ? Je ne sais pas !

 

Laeticia Roserens 13 ans ½

 

 

CHAPITRE 21 : VISITE CULTURELLE/DEUXIEME MALAISE

 

Le bon sens nous montre que la vie

Humaine est courte et qu’il vaut mieux

Faire de notre court passage sur terre

Quelque chose d’utile pour soi et pour les autres.

 

Dalaï Lama

 

Mardi, le 17 juin 2003

 

 

Cette semaine étant la semaine précédant les vacances d’été s’appelle « semaine de sport », Hier j’ai pris l’option basket et aujourd’hui l’option la plus tranquille : visite culturelle.

Durant la matinée, nous allons voir une exposition de peinture à Martigny, à midi nous pique-niquerons aux gouilles du St-Bernard et finalement nous irons au musée Giannada qui est cette année consacrée au grand inventeur « Léonard de Vinci »

 

Maman rentre ce soir de son séjour à l’hôpital, c’est donc Christelle qui m’a préparé mes sandwich qui bien sûr finiront dans la poubelle intacts.

 

Deux profs nous accompagnent, n’étant pas beaucoup leur deux voitures suffirent à tous nous transporter. Nous nous parquons devant la médiathèque de Martigny instaurée sur deux étages. Fabienne a choisi la même option que moi à mon grand regret, elle ne me cherche pas des noises, car ces petits copains ne sont pas là avec elle cette fois.

 

Il est 9h30 lorsque nous commençons la visite de l’expo de peinture, c’est joli cependant cette art ne me passionne vraiment pas. Certain tableaux me font vraiment rire, c’est juste un gros point au milieu d’un fond blanc et le pire c’est que ça se vend des millions juste parce-que y a la signature de l’artiste au fond de la toile.

 

Notre petite exploration est terminée, retour au bus et direction les gouilles du St-Bernard. Il fait une chaleur d’Enfer heureusement qu’à Martigny il y a toujours du vent frais. Prenant le soin de jeter mon sandwich à la première poubelle croisée, je m’installe seule à quelques mètres de trois filles. Parmi elles, *Aïcha*, la fille de l’assistante sociale à maman. Elle se tourne vers moi et commence à discuter.

- Tu ne manges pas Laeticia ?

- Non, j’ai bien déjeuné ce matin, je n’ai pas très faim. Mentis-je

- Ah d’accord, tu as des frères et sœurs ?

« Pourquoi, est-ce-qu’elle me parle ? » ça me fait plaisir or ça me met vachement mal à l’aise ! Car je ne sais jamais comment poursuivre la discussion avec quelqu’un.

- Euh…Oui, j’ai une petite sœur Ophélie et un demi-frère qui est né vendredi.

- Oh ! Ton frère est tout bébé alors ? C’est chou ! 

« Si tu le dis »

- Ta sœur elle a quel âge ?

- Elle vient d’avoir huit ans en mai.

- Ah ! C’est cool !

- Oui.

Je me sens si bête, je n’arrive pas continuer le dialogue, les questions se bousculent dans ma tête : « Que pense-t-elle de moi ? Que va-t-elle dire à ses amis sur mon compte ? Va-t-elle me critiquer ? »

- Laeticia, tu te rappelles qu’un jour genre il y a peut-être quatre mois, quelqu’un a glissé une lettre sur ton casier ?

- Oui…

A cette question, je finis par lever mes yeux restés baissés tout le long avant quand elle me parlait.

Oui, je m’en rappelais :

 

Il y a quelque mois, on s’écrivait beaucoup avec Sylvie car j’arrive mieux communiquer par écrit que oralement. Elle gardait toutes les lettres que je lui transmettais dans ses poches de vestes ou dans sa chambre. Un jour Fabienne les lui a volées et les a faites lire à toute l’école. Une des lettres disait :

 

Si je suis toujours habillée en noir, c’est que le noir est la couleur de la mort et à la mort j’y pense très souvent ! Si je suis soi-disant anorexique, c’est que je veux démissionner de la vie, m’en aller, CREVER….

 

Quelque jours après que Fabienne les a faites lire à tout le monde, j’ai découvert un papier glissé dans la fente de mon casier clos, elle n’était pas signée, elle était anonyme. Elle disait ceci :

 

Laeticia, j’ai lu la lettre que tu as donné à Sylvie, elle m’a beaucoup touchée. Je vois que tu as énormément de problèmes et si tu désires parler à quelqu’un, je veux bien être ce quelqu’un. N’hésite pas mon numéro est le…..

 

- Oui, je m’en souviens très bien. Dis-je calmement

- C’est moi qui l’avais écrite. M’avoue-t-elle

- Merci beaucoup de t’inquiéter pour moi, mais je te jure qu’il n y a pas de raisons.

- Laeticia, tout le monde a besoin d’aide un jour ou l’autre. Me dit-elle avec sagesse.

- Peut-être. Lui répondis-je

«  Moi, je n’en ai pas besoin et je n’en aurai jamais besoin ! »

- Alors si tu as besoin de parler, je suis toujours là.

- Merci Aïcha, ça me touche beaucoup.

 

Il est 13h30 quand nous prenons la direction du musée Gianadda, cette exploration me passionne bien plus que l’expo de peinture de ce matin. Je reste tout le long aux côtés de la prof nous faisant faire la visite, il s’agit de Madame Pascal.

 

L’après-midi touche à sa fin, nous nous posons dans le grand jardin extérieur du musée. Je m’assois seule à une table.

 

Soudain, je ne me sens pas du tout bien, une grande faiblesse envahit mon être tout entier, ma tête tourne, des parasites brouillent mon champ de vision, je chute, tout devient noir. J’ouïs tout ce qui se passe autour de moi, mais ça me semble si loin tel des brouhahas. Je sens une très proche présence se positionner à mes côtés :

- Laeticia…Laeticia…Elle est blanche, appelez un prof vite ! Oh ! Mon Dieu ! Cette voix appartient à Aïcha.

On me bascule sur le flanc, ma conscience revient gentiment.

- Laeticia…Laeticia…appelle Madame Pascal.

Mes esprits reviennent lentement, la force d’ouvrir les yeux me manque, quand je l’eue enfin, le premier visage que je vois et celui de Madame Pascal.

- Eloignez-vous ! Elle reprend connaissance. Laeticia ça va ? Tu peux t’assoir ?

- Elle n’a vraiment pas l’air bien. Remarque une des filles du groupe

- Eloignez-vous je vous dis ! Leur ordonne la prof

Je tente de m’assoir, Madame Pascal me donne un coup de main.

- Laeticia, tu te sens mieux ?

- Oui, Madame merci

- Ecoutez les filles, mon collègue va vous ramener, moi j’amène Laeticia chez elle. Tu habites ou ?

- A Bieudron.

- Ok, tu penses être capable de te lever ?

- Oui, je crois.

Elle me soutient et nous marchons à la voiture. Mes genoux me tiennent à peine debout, la pauvre prof a presque tout mon poids sur l’épaule.

 

Durant le chemin, j’ai droit aux questions habituelles :

- Tu as mangé aujourd’hui ?

- Oui. Affabulais-je

-Ca t’arrive souvent ces pertes de connaissance ?

- Non. Mentis-je encore.

- Il y a quelqu’un chez toi ?

- Non, ma maman est à l’hôpital, mais elle rentre ce soir.

- Tu arriverais à me donner son numéro pour que je lui explique ce qui s’est passé.

- Oui, voilà.

 

Nous arrivons devant la maison :

 

- Tu arriveras monter seule chez toi ou tu veux que je t’amène ?

- Non merci Madame je pense que ça ira. Merci beaucoup de m’avoir ramener.

- De rien.

Une fois arrivée dans l’appartement, je me couche sur le canapé et m’endors rapidement.

 

 

MON CŒUR (2)

 

La vie est un enjeu

Si difficile à gagner

 

Mon cœur

De larmes est inondées

 

D’angoisse

Il est percé

 

De désespoir

Il est poignardé

 

De fantômes du passé

Il est hanté

 

D’images

Il est apeuré

 

De jalousies

Il est déchiré

 

De souffrance

Il est anéanti

 

Laeticia Roserens 16 ans


CHAPITRE 22 : SOIREE A L’HÔPITAL

 

Il a des choses que l’intelligence

Seule est capable de chercher, mais que

Par elle-même elle ne trouvera jamais

Ces choses, l’instinct seul les trouverait

Mais il ne le cherchera jamais.

 

Proverbe de Henri bergson

 

Deux heures passent, il est un peu prêt 18h30 lorsque maman fait irruption au salon, Tiago dans ses bras, elle me regarde et dit :

 

- Je ne peux pas te laisser comme ça, je vais t’amener aux urgences.

A peine revenue de l’hôpital, qu’elle doit y retourner par ma faute.

- Mais non maman, je ne pense pas que ce soit utile

- Mais tu as vu ta tête ? Moi, je ne te laisse pas dans cet état. Elle saisit son portable et rappelle le taxi qui venait il y a à peine quelques minutes de la déposer devant la maison.

 

Elle me soulève de son bras libre et m’aide à marcher jusqu’à l’extérieur où le véhicule nous attend. Nous croisons notre jeune voisin *Michel*.

 

- Salut Michel, dis ça me gêne de te demander ça mais je dois amener Laeticia aux urgences. Est-ce-que tu peux t’occuper d’Ophélie ? la faire souper et la mettre au lit s’il te plaît.

- Oui, aucun souci.

- Merci beaucoup.

 

Le voyage me paraît long, nous arrivons enfin au secrétariat de l’hôpital où on doit remplir des tonnes de papiers : inscription, numéro de caisse maladie etc… Une fois fini, nous nous installons à la salle d’attente et patientons bien une heure avant qu’un infirmier se décide de nous interpeller. Il nous emmène dans une salle aux parois vert caca pomme, une couleur hideuse.

 

- Asseyez-vous seulement. Alors qu’est-ce-qui vous amène ?

Maman lui répond :

- En fait je viens de rentrer de la maternité ce soir même. Deux heures avant je fasse mon départ, j’ai reçu un téléphone d’une prof à Laeticia ici présente. La prof m’annonce que Laeticia a fait un malaise lors d’une visite culturelle à Martigny, d’après les dires de cette dame, ma fille allait vraiment mal.

- Laeticia, tu as mangé aujourd’hui ? Me questionne l’infirmier

« Et c’est reparti avec ces fameuse questions de la mort qui tue »

- Oui, deux sandwichs au jambon. Inventais-je

J’évite le regard à maman car je sais qu’elle ne me croit pas, or elle se tait.

- D’accord, ça t’arrive souvent ces pertes de connaissances ?

- Non.

- Bon, nous allons t’examiner pour commencer. Mets-toi en sous-vêtements s’il te plaît.

Il sort un instant et revient cinq minutes plus tard.

- Monte sur la balance, nous allons te peser.

« Oh ! Non pas elle ! » J’ai froid, on se croirait dans un réfrigérateur. L’angoisse m’anéantit lorsque je monte sur ce bourreau de métal.

- Quarante-huit kilos.

« Mais bien sûr, vous êtes sûr qu’on peut se fier à votre balance ? » Depuis le début de mon régime, j’ai soi-disant perdu quinze kilos, au fond de moi je sais très bien que je n’ai pas maigri d’un millimètre, mon image dans le miroir n’a jamais changée, c’est toujours celle d’un gros pachyderme que je suis. Un petit quarante kilos ne serait pas de refus personnellement avec mes 1m60 ce serait parfait. Je désespère, je n’aurai jamais un physique parfait comme les mannequins. Ce n’est pas « mince »que je veux être mais « maigre », « très maigre », que mes os soient la seule chose qu’on voit sur moi. Je préfère peser trente kilos, finir à l’hôpital plutôt que rester cette grosse vache.

 

- Laeticia, vas-tu tous les jours à selle ?

- Non, j’y vais que très rarement.

- As-tu mal quelque part ?

- Oui, j’ai très mal au ventre tous les jours.

 

Il se tourne vers maman :

- Madame, nous allons procéder à un nettoyage d’estomac, une infirmière le fera, je vais aller en chercher une.

« Beurk, quelle horreur ! » Ils vont m’insérer un grand tuyaux dans mon anus et me nettoyer mon intérieur corporel.

- D’accord. Répond maman semblant aussi dégoûtée que moi, cependant elle rester auprès de moi.

L’infirmier part chercher une collègue. Tiago crie famine, maman lève son t-shirt et lui donne le sein.

- Laeticia, tu trouves ça drôle d’être ici ? m’interroge-t-elle pleine de reproches.

- Non

- Tu as vu tous les kilos que tu as perdus, tu m’avais promis qu’à cinquante kilos tu t’arrêterais, une preuve de plus que tu vas tout droit dans l’anorexie. Continue ainsi et ce ne sera pas qu’un soir à l’hôpital mais des semaines voire des jours.

- Maman, je ne suis pas anorexique. Je ne suis pas encore assez bien dans ma peau pour arrêter de maigrir, il faut encore plus.

- Même quand tu feras trente kilos, tu ne seras pas satisfaite. Tu voulais faire cinquante ben voilà tu as deux kilos de moins et tu n’es pas encore contente.

Je hoche la tête et secoue mes épaules d’un geste m’enfoutisme. De toute façon, elle ne peut pas comprendre et elle ne comprendra jamais, elle ignore ce que je ressens au fond de moi. Elle ne sait ni mes peurs, ni mes angoisses, ni mes secrets, ni la désagréable et insupportable souffrance qui me persécute. Si seulement elle pouvait lire en moi, ça m’éviterai bien des explications. Si seulement elle pouvait voir et ressentir ce que j’ai dans mon cœur, voir ce que je vois lorsque je me reflète dans un miroir, ça lui permettrai d’en apprendre beaucoup à mon sujet par exemple le viol que j’ai enduré à huit ans. Elle ne comprend rien et elle ne voit rien à mon grand regret.

 

Quarante-cinq minutes ont passé au moment où une infirmière apparaît.

 

- Bonsoir, je viens pour le nettoyage d’estomac.

- Bonsoir.

- Bon, je te laisse t’allonger sur le lit et te mettre sur le côté. Nous allons faire le ménage dans cet estomac tout malade. C’est quelque chose de désagréable, mais tu verras après tu te sentiras bien mieux.

Toutes ces paroles ne me rassurent pas davantage.

- On y va…tu es prête ?

« Ai-je vraiment le choix d’être prête ou pas ? »

- Oui.

J’ai jamais eu autant mal de toute ma vie, c’est comme si on m’éventrait de l’intérieur tel un vulgaire cochon. Ça fait un mal de chien,  Jj’en ai les larmes aux yeux.

Je suis gentiment soulagée lorsque je sens qu’elle retire le tuyau.

 

- Voilà c’est fait, ça va ?

- Oui, merci.

- Tu n’as pas eu trop mal ?

- Non. Mentis-je

- Dans quelques minutes, tu devras courir aux toilettes qui sont à la sortie de cette pièce à droite.

Elle n’eut pas tort, cinq minutes après je me précipite aux toilettes et y reste bien quinze minutes.

C’est plus radical que des laxatifs. J’en prends toujours mais ils ne me font plus aucun effet.

J’ai même essayé d’augmenter la dose, rien n’y fait.

Quand j’eus fini mon besoin, ma douleur ventrale se dissipa. Je retourne dans la salle où maman et l’infirmière m’attendent.

- Alors tu te sens mieux ? me demande l’infirmière

- Oui, beaucoup mieux merci.

- Durant ton absence, ta maman m’a un peu parlé de ta situation.

- Ah ! oui ?

« Sans blague »

- Elle m’a dit que tu ne te nourrissais que de salade verte sans sauce et que ça faisait déjà deux ans que tu suivais un régime draconien. C’est vrai ?

- Oui.

- Tu n’as pas peur des conséquences ?

- Non

- Ecoutez Madame Roserens je suis un peu mal placé, car n’étant pas son médecin de famille, je connais rien d’elle. Le seul conseil que je peux vous donner c’est de l’amener au plus vite chez son médecin de famille.

- Oui, c’est ce que je pensais faire.

- Et en ce qui concerne le pronostic de ce soir. Je pense que Laeticia, ayant vécu pas mal de choses ces derniers temps, entre ses camarades d’école qui lui en font voir de toutes les couleurs, votre petit garçon qu’elle n’acceptait pas, tout cet ensemble d’événement lui ont provoqué un blocage au niveau de l’estomac. Tout était coincé, ses intestins, son estomac, tous en ont subi les conséquences. Je vais vous faire une ordonnance : les médicaments qu’elle doit prendre une fois par jour sont des Transipege, ceux-ci lui permettront d’aller à selle plus régulièrement.

- Oui, je vous remercie.

- Avez-vous des questions ? Ou désirez-vous des précisions sur tout ce que je vous ai dit ?

- Non, je crois que tout a été clair. Merci.

- De rien, au revoir et bonne soirée.

 

Voilà c’est là que s’achève ma mésaventure à l’hôpital. Les trois derniers jours qu’ils restaient avant les vacances d’été je ne suis pas retournée à l’école, je ne suis plus jamais retournée à Basse-Nendaz.

 

 

 

 

 

TIRE DE MON JOURNAL INTIME

 

Samedi, le 6 septembre 2003

 

J’en ai marre d’être ici à Sierre. Peut-être que je dois rester des semaines voire des mois.

Je veux recommencer l’école à Sion, je veux m’enlever cette souffrance de la tête. Je veux arrêter de me morfondre, je veux avoir des copains, des copines.

 

Je veux rentrer chez moi. Libérez-moi !

De toute façon, je me soignerai un point c’est tout ! J’aurai une vie normale. Ma vie aura des moments difficiles, ainsi que des moments merveilleux que je ne regretterai pas !

 

Laeticia Roserens 13 ans ½

 

 

CHAPITRE 23 J’AIME PAS LES ŒUFS

 

Les hommes ont non seulement

Le pouvoir de rendre leur propre vie

Heureuse, mais aussi celui d’aider les autres

Nous avons une créativité naturelle : il est très

Important d’en avoir conscience.

 

Dalaï Lama

 

 

Cela fait un peu prêt un mois que je suis en vacance.

Je me lève, j’allume ma télévision pour regarder KD2A. Nous sommes le 1er août 2003, c’est la fête nationale de la Suisse. Pour cette soirée spéciale, nous sortons avec Chantal, la meilleure amie à maman.

Après avoir regardé mon émission, je range et nettoie ma chambre. Je hais le désordre dans le lieu où je passe le plus clair de mon temps. Chaque jour, je passe la poussière, je range, je mets les livres droits sur ma bibliothèque, je les nettoie les uns après les autres, je passe l’aspirateur mais pas la panosse car ma chambre est faite de moquette. Tous les jours, j’en ai un peu prêt pour 2h30 à mettre en ordre mon refuge. Il est 13h quand le natel à maman annonça un message. Etant une personne très curieuse, je profite qu’elle dorme pour le lire.

 

« Oh !Non, Chantal s’est bloqué le dos, elle ne peut pas venir donc on va se faire chier à la baraque ce soir »

 

Une idée me traverse l’esprit. Je vais mijoter un repas digne d’un restaurant, composé d’une entrée, d’un plat principal et d’un dessert. Malgré que la nourriture est mon ennemie jurée, j’adore cuisiner pour les autres. Je me nourris en quelque sorte de leur plaisir.

 

Comme entrée je prépare une salade verte avec des croûtons baignée dans très peu de sauce comme d’habitude : sans mayonnaise et sans huile.

Comme plat principal je mitonne des tomates aux œufs que moi je ne mangerai pas, je déteste les œufs en plus ils ont 130 calories par 100 grammes, c’est gigantesque, je m’y refuse.

Et pour le dessert : glace moka et glace vanille faites maison. Ça je n’y pense même pas, c’est bourré de sucre, de crème… le genre de chose à quoi il ne faut plus jamais que je touche si je veux perdre du poids.

 

Je garnis avec soin les assiettes de maman et Ophélie. La mienne est presque vide, il y a deux minuscules feuilles de salades privé de croûton et avec une mini goutte de sauce.

- A TABLE ! Appelais-je

- OUI, ON ARRIVE ! Me crie maman depuis le salon.

 

Il fait horriblement chaud donc je dresse la table dehors (L’été 2003, fut un des étés les plus chauds. Le thermomètre est monté jusqu’à 39 °.)

 

- OH ! WAOUH ! s’exclame maman en voyant mon travail.

J’implore le ciel qu’elle ne remarque pas que je n’ai quasiment pas de sauce sur mes feuilles de salade. Si elle le voit, je suis morte.

 

Nous terminons l’entrée, j’apporte deux assiettes de tomates aux œufs. Maman me regarde furieuse. Je sais déjà ce qui va suivre :

 

- Ton assiette, elle est où ?

« Ça y est qu’est-ce-que je disais, et c’est parti pour l’engueulade du jour »

- Je n’aime pas les œufs.

- Alors ça c’est nouveau.

- Non, je n’ai jamais aimé.

- LAETICIA, ARRETE DE CHERCHER DES EXCUSES, JE NE TE CROIS PLUS. J’EN AI MARRE DE TA MERDE, TON ANOREXIE DE MERDE !

- JE SUIS PAS ANOREXIQUE PUTAIN, JE VAIS TRES BIEN ! LA PREUVE, JE TIENS ENCORE SUR MES JAMBES !

- OUI, BIEN SÛR ET C’EST POUR ÇA QUE J’AI DU T’AMENER AUX URGENCES IL Y A UN MOIS ?

- ÇA N’A RIEN A VOIR, C’ÉTAIT JUSTE UNE CHUTE DE PRESSION RIEN DE PLUS !

- TU VEUX CREVER BEN VAS-Y ! MOI, JE NE TE RETIENS PAS !

- DE TOUTE FACON, CE NE SERAIT PAS UNE GRANDE PERTE, TU AS TIAGO MAINTENANT !

- SI TU LE DIS, JE NE VAIS PAS DIRE LE CONTRAIRE.

 

Je pars m’enfermer dans ma bulle qui n’est autre que ma chère chambre. Cette fois, c’en est fini de moi, je vais mettre fin à mes jours. Comme d’habitude après chaque dispute, je ne me contrôle plus, je casse des objets en verre, je fracasse ma tête dans la boiserie, je souhaite tant avoir une commotion cérébrale, je désire tomber dans le coma ou tout simplement mourir et ne plus jamais revenir.

- MORT PRENDS-MOI ! MAIS BORDEL QU’EST-CE-QUE TU ATTENDS ? POURQUOI ? POURQUOI ? JE VOUS DETESTE TOUS ! CREVER, MOURIR, LAISSEZ-MOI PARTIR ! J’AI MAL, ARRÊTEZ JE VOUS EN SUPPLIE ! POURQUOI, POURQUOI, POURQUOI…. ?

 

Je hurle à m’en faire éclater mes cordes vocales. Je me roule parterre pour oublier que j’ai mal à l’intérieur et que ma souffrance cesse de me torturer ainsi. J’ai comme le sentiment d’être brûlée à vif, la douleur est si intense. Je n’en peux plus…J’ai totalement perdu ma voie, mon chemin. Tout n’est que douleurs, tout n’est que souffrances !

 

Je continue de me fracasser le crâne contre le mur.

- JE VEUX CREVER ! LAISSEZ-MOI CREVER !

 

Je crie encore quelques minutes, m’écroule au sol et m’endors dans un très profond sommeil sans rêve.

 

 

MES PENSEES

 

Mes pensées

Sont le fidèle reflet de mon passé

Sont la fidèle image de la vérité

Sont la fidèle illusion de ma vie rêvée

 

Mes pensées

Sont avancées

Par un courant d’une infinité beauté

Par une éternelle bonté

 

Mes pensées

Sont un bouquet de pensées

Dans mon cœur elles sont habitées

Parfois elles ont su me blesser

 

Mes pensées

Sont hantées par mon passé

Il faut à tout prix que la vérité

Ait la puissance d’éclater.

 

Laeticia Roserens 16 ans

 

 

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03/04/2011
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